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La Constance du prédateur - Maxime Chattam (2022)

Maxime Chattam revient avec ce roman à ses premiers amours : un thriller haletant, aussi sombre que terriblement bien construit. Âmes sensibles, s'abstenir.


 

La Constance du prédateur, Maxime Chattam, Albin Michel (2022)

Ils l’ont surnommé Charon, le passeur des morts. De son mode opératoire, on ignore tout, sauf sa signature, singulière : une tête d’oiseau. Il n’a jamais été arrêté, jamais identifié, malgré le nombre considérable de victimes qu’il a laissées derrière lui. Jusqu’à ce que ses crimes resurgissent du passé, dans les profondeurs d’une mine abandonnée...

Plongez avec Ludivine Vancker dans le Département des Sciences du Comportement, les profilers, jusque dans l’âme d’un monstre.

 

Avec La Constance du prédateur, Maxime Chattam revient à ses premiers amours, les tueurs en série et les thrillers glaçants. Cinq ans après le troisième tome de sa série consacrée à Ludivine Vancker, et après avoir écrit quelques romans indépendants (dont Un(e)Secte chroniqué sur ce blog), tout amateur de Maxime Chattam ne peut qu’être ravi de se plonger dans un roman mettant en scène Ludivine, l’une de ses personnages fétiches. Et le plaisir (autant que l’effroi) est au rendez-vous.


Du pur Chattam


Entamé il y a un peu plus de dix ans maintenant avec son premier volume La Conjuration primitive sorti en 2012, le cycle dédié à Ludivine Vancker s’enrichit avec ce roman d’un nouveau volume. Mais si les trois premiers tomes mettaient en scène une Ludivine Vancker lieutenant à la section de recherche de la Gendarmerie, la voici désormais fraîchement débarquée au Département des Sciences du Comportement. Et cela représente un nouveau départ pour elle. Car après avoir vécu des événements traumatisants par le passé (n’ayez crainte, ce livre peut se lire indépendamment des précédents), il était temps pour elle de changer d’air et de se faire mutée dans une autre entité de la gendarmerie dédiée à ce que l’on appelle communément les « profilers ». Pour une enquêtrice qui a toujours su se plonger au cœur du Mal, se mettre à la place de ses plus terribles représentants pour se mettre à penser comme eux, rien de surprenant.


Mais si cette mutation était ce dont elle rêvait le plus, elle aurait aimé quitter ses anciens collègues comme il se doit. Malheureusement pour elle, son départ doit être précipité car une nouvelle affaire vient de tomber au Département des Sciences du Comportement : un charnier a été découvert dans une mine désaffectée dans l’Est… Ludivine n’a pas le temps de faire plus ample connaissance avec sa nouvelle partenaire et supérieure Lucie, elle doit se rendre sur place pour assister la gendarmerie dans cette opération de grande ampleur qui la plongera au plus profond de la monstruosité humaine…

Les seuls monstres qu’on rencontrait n’étaient-ils pas, après tout, ceux qu’on se créait soit-même, avec ses peurs et ses névroses ? Ils jaillissaient de nos propres failles. Ne disait-on pas « nos démons » pour évoquer nos tourments ?

Monstruosité… Le mot n’est peut-être pas assez fort. Il s’agit d’un roman de Maxime Chattam après tout. Âmes sensibles et cœurs légers, abstenez-vous. Car l’auteur ne lésine pas sur les détails les plus sordides, les plus crus et les plus abjects des crimes qu’il met en scène. Comme à son habitude, Chattam veut rendre ses livres les plus réalistes possibles. Et lorsque ces derniers se focalisent comme ici sur les déviances d’un tueur en série, il se doit de décrire les horreurs dont son tueur est coupable de la manière la plus fidèle et concrète possible, quitte à rendre certains de ses passages presque insoutenables. Alors, oui, il n’hésite pas à décrire des viols, des meurtres, des séances de tortures autant psychologiques que physiques, et souvent du point de vue de la victime. Et dans ce livre, dans lequel le tueur est implacable et sans la moindre empathie, autant dire que la lecture est parfois difficile. Mais si certaines pages peuvent être particulièrement irrespirables, aucune d’entre elles n’est gratuite, toutes sont mises au service du récit, un récit mené tambour battant.


Un récit aussi efficace et haletant qui nous laisse (un peu) sur notre faim


La Constance du prédateur est un roman dans la digne lignée des précédents de son auteur. Dès les premières pages, le rythme est présent, la tension monte. Si le premier chapitre est là pour nous rappeler tout l’attachement que les lecteurs assidus de Maxime Chattam portent à l’une de leur héroïne préférée, Ludivine, les suivants nous plongent presque directement dans les méandres d’une enquête criminelle qui sera, comme souvent avec son auteur, hors norme. Du Grand Est à Bordeaux en passant par le Nord, on suivra le nouveau duo que soumet Chattam à son lectorat : Ludivine et Lucie. Et autant dire que la mayonnaise prend d’emblée : contrairement à bons nombres de duos de détectives, souvent complémentaires, on a ici affaire à deux femmes qui présentent de nombreux points communs. Le même raisonnement analytique, les mêmes fêlures, qui leur permettent d’avancer de concert.

La dissociation entre le corps et l’esprit avait été rapide. Et dans les premiers temps, ce qui demeurait de Chloé s’était liquéfié, avec l'envie de disparaître complètement, d’être avalé par les cellules et digéré, pour n’être plus qu’une enveloppe, sans âme, et surtout sans pensée.

Si l’enquête est menée avec la même précision et la même efficacité que les autres romans de son auteur, rendant sa lecture tout aussi agréable, certains éléments ne m’ont semblé pas suffisamment exploités, et parfois traités avec une certaine forme de superficialité. Je pense notamment aux motivations du tueur et aux références… (comment dirais-je sans trop en dévoiler)... disons ésotériques. Maxime Chattam nous les présente comme des détails particulièrement importants aux yeux de l’enquête et du « profil » que Ludivine et Lucie tentent de dresser, sans pour autant les développer davantage. Dommage. D’autant plus que le cœur de ce récit, l’idée sur laquelle il repose, devient assez rapidement évidente. Avoir des éléments de réponses plus fouillées aurait sans doute été appréciable. On notera également, à l’aire #Metoo, la volonté de l’auteur d’évoquer ces changements sociétaux, volonté bien évidemment bienvenue mais un peu trop appuyée dans certains passages peut-être.


Cela étant, comme souvent, et il s’agit sans doute là d’une impression post-lecture qui apparaît souvent lorsqu’on referme l’un de ses livres, Maxime Chattam nous donne le sentiment d’avoir énormément travaillé son texte, que l’intrigue, les personnages sont tous le fruit d’une construction millimétrée. Le travail de recherche et de documentation est particulièrement prégnant, autant sur les techniques d’investigation que sur la personnalité hors norme du tueur en série. Cette ambition est à mettre au crédit de son auteur tant ces éléments-là rendent la lecture de ce livre extrêmement plaisante.

Décortiquer le pire de l’homme, c’est se rassurer sur tout le reste, non ?

Plus globalement, on découvre entre les lignes de ce livre le travail de réflexion que Chattam mène depuis ses débuts sur le Mal, sur ce qui le définit, sur ses caractéristiques et les façons dont il survient. Sans asséner sa vision sur cette problématique, il nous livre des pistes de réflexion à travers ses romans construits sur ses obsessions, ses peurs d’enfance ou d’adolescence. Écrire (et lire, pour nous simples lecteurs) cette noirceur lui permet d’essayer de comprendre la nature dans ce qu’elle a de pire, pour apprécier le meilleur.


A bien des égards, ce roman est donc une réussite. Sa lecture est fluide et plaisante, et le récit est globalement bien mené. Fidèle aux précédents romans de son auteur, on reste pourtant (un peu) sur notre faim. De quoi néanmoins vous faire passer de belles nuits blanches.


Avec La Constance du prédateur, Maxime Chattam revient à ses premiers amours : les thrillers purs et durs, à l’ambiance noire et au rythme haletant. Pari réussi. Les amateurs du genre, et surtout les lecteurs assidus de l'auteur seront ravis de découvrir une nouvelle enquête de Ludivine Vancker, héroïne récurrente de Chattam. Fraîchement débarquée au Département des Sciences du Comportement, elle sera une nouvelle fois au cœur d’une nouvelle enquête criminelle hors norme. Comme à son habitude, Maxime Chattam nous livre un roman construit avec minutie, à l’image de ses personnages particulièrement travaillés. Si certains passages sont à la lecture parfois insoutenables (au fil des ans on commence à reconnaître la « patte Chattam »), rien n’est gratuit, tout est mis au service d’un réalisme aussi cru que nécessaire pour le bien du thriller. Et le rythme s’en ressent : le suspense est au rendez-vous, rendant la lecture de ce livre particulièrement plaisante. Cela étant, si l’enquête est menée avec la même précision et la même efficacité que les autres romans de son auteur, certains éléments ne m’ont semblé pas suffisamment exploités, et parfois traités avec une certaine forme de superficialité. Dommage, car l’idée directrice de ce récit devient rapidement assez évidente, les éléments connexes qui auraient pu être intéressants à creuser se trouvent, me semble-t-il, à peine effleurés. Mais finalement, à bien des égards, ce roman représente somme toute un vrai plaisir de lecture pour qui aime les thrillers sombres et dérangeants. A lire, donc.


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“ Chaque esprit se construit pour lui-même une maison, et par-delà sa maison un monde, et par-delà son monde un ciel.”

Ralph Waldo Emerson

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